Le campement des célibataires...
La photo a été prise début août 1967 à Grenoble sur un stade multisports situé au bord du Drac, qui avait été mis à la disposition des participants à la Semaine Fédérale de cyclotourisme en tant que terrain de camping.
La ville de Grenoble avait obtenu l'organisation de cet évènement avec une idée derrière la tête. Les divers villages olympiques pour les jeux d'hiver 1968 étaient déjà construits, et c'était l'occasion de faire une répétition générale en y servant à manger à plusieurs centaines de personnes pour voir si quelque chose n'allait pas ou pouvait être amélioré. Au fil de la semaine, nous avons donc ainsi servi de cobayes dans diverses localités de la région (Autrans, Uriage, entre autres).
Jusqu'en 1966, nous avions toujours campé dans des tentes individuelles.
Je n'en possédais pas, et m'invitais chez l'un ou chez l'autre. Ayant eu vent d'une offre spéciale à la Samaritaine, j'achetai celle-ci en juillet 1967 pour que nous soyons enfin tous sous le même toit. . Elle existe du reste toujours, même si nous ne nous en servons plus beaucoup.
Son destin présente une particularité rare: elle a été inaugurée en appartement...
Un week-end du mois de juillet, en compagnie de mon ami qui faisait de la tapisserie à ses heures, nous avons entreposé la table et les chaises de notre salle à manger dans d'autres pièces. Ensuite, nous avons ouvert toutes les fenêtres, et coupé l'eau, le gaz et l'électricité. Puis nous avons monté la tente pour la première fois, fixé les haubans aux pieds des meubles, et cuisiné avec un camping gaz posé sur le plancher.
Jusque là, même si l'affaire pouvait paraître insolite, tout procédait d'une certaine logique, que l'on pourrait même qualifier de rigoureuse. Mais il y eut la cerise sur le gâteau, quand nous avons entendu frapper à la porte d'entrée. C'étaient deux jeunes femmes, probablement des étudiantes, qui effectuaient un sondage sur les habitudes des téléspectateurs.
"-Mesdames, je crains que vous n'ayez pas frappé à la bonne porte: nous n'avons pas de téléviseur ..." , ce qui était du reste absolument exact: le premier téléviseur est entré chez nous en 1976, un cadeau que nous avions fait à mon père pour qu'il puisse regarder les épreuves d'athlétisme des J.O. de Montréal.
"-Et puis, vous voyez, l'électricité est coupée (j'actionnai le commutateur situé près de la porte et fis un geste vers la lampe de l'entrée qui restait éteinte), vous avez dû essayer de sonner... En fait, nous campons (on pouvait aprecevoir la tente), et nous souhaitons que tout soit dans des conditions les plus proches possibles de la réalité."
À ce moment, mon acolyte arriva sobrement vêtu d'un paréo et porteur d'une gourde: "-Excusez-moi, vous voulez bien me laisser passer? Il faut que j'aille chercher de l'eau dans la cour pour faire cuire les pâtes..." Ce qui n'était rien d'autre qu'un monumental coup d'esbrouffe, car nous avions une vache à eau bien pleine qui pendait sous l'auvent! Dûment remplie dans la cour, d'ailleurs, à la fontaine qui était restée du temps où il n'y avait pas encore l'eau courante dans les étages.
Les jeunes femmes ont redescendu l'escalier à reculons en nous regardant drôlement, et par la fenêtre, nous les avons vues retraverser la première cour en hâtant le pas vers la sortie de l'immeuble.
Elles auraient encore pu poser leurs questions dans les escaliers C et D,
mais elles préférèrent s'abstenir...
Jean Albert Richard 21/11/2013 17:30
@Elvina,merci du commentaire. "Un peu du laisser-aller?:::" Tu manies de charmants euphémismes...
Amitiés,
Jean
Elvina Benoist-Audiau 18/11/2013 17:18
Une histoire très amusante !! je me souviens que nous avions aussi monté notre première tente (avec mes parents) dans l'appartement, ou du moins essayé ! c'est un peu du laisser-aller devant cette tente, ah les célibataires ;-) Amitiés, ElviKlaus Kieslich 18/11/2013 16:48
UppsGruß Klaus